引自:http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2010/03/02/007-niqab-expulsion-reactions.shtml
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Photo: AFP/CRIS BOURONCLE
Une étudiante de l'Université du Caire s'est vue refuser l'accès au campus parce qu'elle portait le niqab.
Les réactions fusent de partout. Le cas de l'étudiante d'origine égyptienne expulsée d'un cours de francisation au cégep Saint-Laurent parce qu'elle refusait d'enlever son niqab ne laisse personne indifférent.
Le premier ministre Jean Charest croit que ce cas litigieux justifiait l'intervention politique de son gouvernement. Selon lui, ce geste exceptionnel ne découle aucunement de l'absence de politique gouvernementale sur la question des accommodements raisonnables.
M. Charest a rappelé que les services offerts au Québec, « ça se fait à découvert ».
Il faut faire attention pour pas monter en épingle chaque cas individuel. Il y a très peu de femmes au Québec qui portent le niqab. Et quand une situation exceptionnelle se présente, on le traite.
― Le premier ministre Jean Charest
La ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec, Yolande James, a fait valoir, par la voix de son attaché de presse, qu'on ne pouvait pas accepter que les objectifs pédagogiques des cours de francisation soient compromis.
Luc Fortin a souligné que l'étudiante en question « a été rencontrée et elle a été avisée par écrit que si elle n'enlevait pas son niqab, elle allait devoir quitter la classe de francisation. Elle a quitté et elle a déposé sa plainte à la Commission des droits de la personne. Et maintenant, on est en attente de l'avis de la Commission ».
Distinguer le hijab du niqab
Alexa Conradi, présidente de la Fédération des femmes du Québec
La Fédération des femmes du Québec (FFQ), qui est contre le fait que l'on interdise le port du hijab aux employées de l'État, trouve qu'il y a cette fois une distinction à faire avec le niqab. Contrairement au hijab, le niqab cache le visage de celle qui le porte. Pour Alexa Conradi, présidente de la FFQ, « c'est un empêchement sérieux à la communication à beaucoup d'égards et ça empêche aussi les femmes d'être libres de leurs mouvements ».
De son côté, la Fédération nationale des enseignants (FNEEQ-CSN), qui représente des professeurs de cégep, réitère sa demande d'adopter une Charte de la laïcité pour mieux baliser les accommodements raisonnables.
Le Syndicat des professeurs de l'État du Québec (SPEQ), le syndicat indépendant qui représente entre autres les enseignants en francisation du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, se dit satisfait de la façon dont le cégep Saint-Laurent a réglé ce cas. Le ministère a fait ce qu'il fallait dans ce contexte, estime le président du SPEQ, Luc Perron.
L'avocat spécialisé en droit constitutionnel et en droit de l'Immigration, Julius Grey, affirme qu'il s'agit d'un cas flagrant de demande d'accommodement qui n'est pas raisonnable.
Un turban, un kirpan, une kippa... Je pense que toutes ces choses-là étaient raisonnables. Mais il y a vraiment une bonne raison pédagogique pour voir le visage d'un étudiant. C'est encore plus important dans une classe de langue, quand il faut observer les lèvres.
― Me Julius Grey
Selon une ex-membre de la Commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables, Rachida Azdouz, le cégep ne doit pas être blâmé dans cette affaire. « C'est un cas typique où l'organisation a respecté son obligation d'accommodement, qui est une obligation de moyens. [...] De son côté, la personne qui demande à être accommodée n'a pas respecté un principe important qui est reconnu par les tribunaux: le principe de réciprocité », dit-elle.
Selon l'auteure du livre Démocratie et égalité des sexes, Diane Guilbault, ce genre de situation devait éclater tôt ou tard. « C'était quelque chose qui nous pendait au bout du nez. Il n'y a pas de balise. Alors, les gens qui ont des convictions très très appuyées testent les balises ou l'absence de balises », affirme-t-elle.
« Dans le cas du cégep, comme il s'agissait d'une revendication religieuse et que la religion a été quasiment sacralisée par nos tribunaux, ils ont préféré en référer à plus haut qu'eux et on voit que la ministre intervient sur un cas individuel parce que c'est un cas délicat », note Mme Guilbault. « Ça montre un peu le désarroi dans lequel se trouvent les institutions et les entreprises privées quand elles font face à l'extrémisme. Parce qu'il faut le dire : dans nos sociétés, se cacher le visage à l'intérieur [...] c'est un geste extrémiste. »
Le débat doit se faire, estime le Congrès musulman canadien
Du côté de la communauté musulmane, les réactions abondent dans le même sens. Sohail Raza, président du Congrès musulman canadien, estime que « le niqab n'est pas compatible avec le mode de vie canadien, avec n'importe quel mode de vie, en fait ».
M. Raza rappelle qu'il y a actuellement un ressac en France et en Suisse contre le port de signes religieux ostentatoires.
Nous ne voulons pas vivre ça au Canada. Il faut que l'on en discute sérieusement au sein de la communauté musulmane.
― Sohail Raza, président du Congrès musulman canadien
Pour le président du Congrès musulman canadien, ce sont des enjeux sociaux qui doivent être débattus. « Ce n'est qu'une question de temps avant que cela se retrouve devant le Parlement. Comme en France, il va falloir qu'on en discute et qu'on prenne position une fois pour toutes. »
Son épouse Raheel Raza, une militante des droits des femmes musulmanes, rappelle que le Coran ne requiert pas de se couvrir le visage, mais seulement de se vêtir avec modestie.
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Une étudiante de l'Université du Caire s'est vue refuser l'accès au campus parce qu'elle portait le niqab.
Les réactions fusent de partout. Le cas de l'étudiante d'origine égyptienne expulsée d'un cours de francisation au cégep Saint-Laurent parce qu'elle refusait d'enlever son niqab ne laisse personne indifférent.
Le premier ministre Jean Charest croit que ce cas litigieux justifiait l'intervention politique de son gouvernement. Selon lui, ce geste exceptionnel ne découle aucunement de l'absence de politique gouvernementale sur la question des accommodements raisonnables.
M. Charest a rappelé que les services offerts au Québec, « ça se fait à découvert ».
Il faut faire attention pour pas monter en épingle chaque cas individuel. Il y a très peu de femmes au Québec qui portent le niqab. Et quand une situation exceptionnelle se présente, on le traite.
― Le premier ministre Jean Charest
La ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec, Yolande James, a fait valoir, par la voix de son attaché de presse, qu'on ne pouvait pas accepter que les objectifs pédagogiques des cours de francisation soient compromis.
Luc Fortin a souligné que l'étudiante en question « a été rencontrée et elle a été avisée par écrit que si elle n'enlevait pas son niqab, elle allait devoir quitter la classe de francisation. Elle a quitté et elle a déposé sa plainte à la Commission des droits de la personne. Et maintenant, on est en attente de l'avis de la Commission ».
Distinguer le hijab du niqab
La Fédération des femmes du Québec (FFQ), qui est contre le fait que l'on interdise le port du hijab aux employées de l'État, trouve qu'il y a cette fois une distinction à faire avec le niqab. Contrairement au hijab, le niqab cache le visage de celle qui le porte. Pour Alexa Conradi, présidente de la FFQ, « c'est un empêchement sérieux à la communication à beaucoup d'égards et ça empêche aussi les femmes d'être libres de leurs mouvements ».
De son côté, la Fédération nationale des enseignants (FNEEQ-CSN), qui représente des professeurs de cégep, réitère sa demande d'adopter une Charte de la laïcité pour mieux baliser les accommodements raisonnables.
Le Syndicat des professeurs de l'État du Québec (SPEQ), le syndicat indépendant qui représente entre autres les enseignants en francisation du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, se dit satisfait de la façon dont le cégep Saint-Laurent a réglé ce cas. Le ministère a fait ce qu'il fallait dans ce contexte, estime le président du SPEQ, Luc Perron.
L'avocat spécialisé en droit constitutionnel et en droit de l'Immigration, Julius Grey, affirme qu'il s'agit d'un cas flagrant de demande d'accommodement qui n'est pas raisonnable.
Un turban, un kirpan, une kippa... Je pense que toutes ces choses-là étaient raisonnables. Mais il y a vraiment une bonne raison pédagogique pour voir le visage d'un étudiant. C'est encore plus important dans une classe de langue, quand il faut observer les lèvres.
― Me Julius Grey
Selon une ex-membre de la Commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables, Rachida Azdouz, le cégep ne doit pas être blâmé dans cette affaire. « C'est un cas typique où l'organisation a respecté son obligation d'accommodement, qui est une obligation de moyens. [...] De son côté, la personne qui demande à être accommodée n'a pas respecté un principe important qui est reconnu par les tribunaux: le principe de réciprocité », dit-elle.
Selon l'auteure du livre Démocratie et égalité des sexes, Diane Guilbault, ce genre de situation devait éclater tôt ou tard. « C'était quelque chose qui nous pendait au bout du nez. Il n'y a pas de balise. Alors, les gens qui ont des convictions très très appuyées testent les balises ou l'absence de balises », affirme-t-elle.
« Dans le cas du cégep, comme il s'agissait d'une revendication religieuse et que la religion a été quasiment sacralisée par nos tribunaux, ils ont préféré en référer à plus haut qu'eux et on voit que la ministre intervient sur un cas individuel parce que c'est un cas délicat », note Mme Guilbault. « Ça montre un peu le désarroi dans lequel se trouvent les institutions et les entreprises privées quand elles font face à l'extrémisme. Parce qu'il faut le dire : dans nos sociétés, se cacher le visage à l'intérieur [...] c'est un geste extrémiste. »
Le débat doit se faire, estime le Congrès musulman canadien
Du côté de la communauté musulmane, les réactions abondent dans le même sens. Sohail Raza, président du Congrès musulman canadien, estime que « le niqab n'est pas compatible avec le mode de vie canadien, avec n'importe quel mode de vie, en fait ».
M. Raza rappelle qu'il y a actuellement un ressac en France et en Suisse contre le port de signes religieux ostentatoires.
Nous ne voulons pas vivre ça au Canada. Il faut que l'on en discute sérieusement au sein de la communauté musulmane.
― Sohail Raza, président du Congrès musulman canadien
Pour le président du Congrès musulman canadien, ce sont des enjeux sociaux qui doivent être débattus. « Ce n'est qu'une question de temps avant que cela se retrouve devant le Parlement. Comme en France, il va falloir qu'on en discute et qu'on prenne position une fois pour toutes. »
Son épouse Raheel Raza, une militante des droits des femmes musulmanes, rappelle que le Coran ne requiert pas de se couvrir le visage, mais seulement de se vêtir avec modestie.